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Une grève sauvage domestiquée : un tribunal de l’Alberta confirme la suspension des cotisations syndicales pour grève illégale par l’AUPE

David M. Price et Cameron Penn
19 août 2025
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Dans l’affaire Alberta Union of Provincial Employees v. Alberta Health Services, 2025ABKB 465 (AUPE v. AHS), la Cour du Banc du Roi de l’Alberta a confirmé la décision de l’Alberta Labour Relations Board (la Commission) de pénaliser l’Alberta Union of Provincial Employees (AUPE ou le syndicat) en suspendant ses cotisations syndicales pendant un mois en conséquence de son soutien à une « grève sauvage » illégale pendant la pandémie de COVID-19.

Contexte et décision de la Commission

En octobre 2020, aux premiers jours de la pandémie de COVID-19, environ 2 200 travailleurs de la santé (environ 5 % de l’unité de négociation de l’AUPE avec l’AHS) ont participé à une grève illégale d’une demi-journée dans 70 établissements de santé de l’Alberta gérés par Alberta Health Services (AHS). Ce mouvement a entraîné la perte de plus de 14 000 heures de travail, des retards dans les soins aux patients, le report de centaines d’opérations chirurgicales et une pression énorme sur les travailleurs de la santé encore en poste.

En guise de réponse, AHS a demandé à la Commission de prendre diverses mesures correctives, dont une ordonnance prescrivant la suspension des versements des cotisations syndicales de l’AUPE en vertu de l’article 114 du Labour Relations Code.

L’article 114 prévoit qu’en cas de grève illégale affectant les relations de négociation dont l’enjeu est important pour le public, la Commission peut ordonner à l’employeur de suspendre la retenue et le versement des cotisations syndicales pour une période maximale de six mois.

Dans sa décision initiale (2023 ALRB 2), la Commission a estimé que l’AUPE avait encouragé et soutenu la grève illégale publiquement et en privé, et qu’il avait « tourné le couteau dans la plaie » à un moment où le système de santé était déjà fortement éprouvé. Même si seuls 5 % de ses membres environ ont participé à la grève illégale, la Commission a suspendu les cotisations syndicales pour l’ensemble de l’unité de négociation pendant un mois, au motif que le comportement du syndicat justifiait des mesures de dissuasion. La grève illégale [traduction] « a mis en danger le bien-être des Albertains et a imposé des contraintes supplémentaires à un système de soins de santé déjà ébranlé par les défis sans précédent posés par la pandémie ».

La Commission a aussi rejeté la contestation constitutionnelle de l’article 114 par l’AUPE. Une décision antérieure de la Commission avait déjà confirmé la constitutionnalité de la version précédente de l’article 114. L’AUPE a fait valoir que la jurisprudence de la Cour suprême du Canada sur le droit à la liberté d’association (alinéa 2d)) de la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte) avait évolué depuis. Selon l’AUPE, l’alinéa 2d) « garantit le droit des employés de véritablement s’associer en vue de réaliser des objectifs collectifs relatifs aux conditions de travail ». Par contre, cette disposition ne garantit pas l’accès à un régime statutaire ou à un modèle particulier de relations de travail. La Commission a conclu qu’une suspension des cotisations en application de l’article 114 ne constituait pas une « entrave substantielle » au droit du travail, puisque cette suspension temporaire n’affecterait pas la capacité des membres d’un syndicat à se réunir pour poursuivre des objectifs communs.

La Commission a par la suite rejeté la demande de réexamen présentée par l’AUPE (2023 CanLII 117152).

La Cour du Banc du Roi rejette la demande de contrôle judiciaire de l’AUPE

Le juge Teskey de la Cour du Banc du Roi a rejeté la demande de contrôle judiciaire de la décision initiale rendue par la Commission.

L’AUPE contestait la décision de la Commission en faisant valoir, entre autres, que celle-ci avait commis une erreur en imposant une pénalité générale à l’ensemble de l’unité de négociation, alors que seule une petite partie des membres de cette unité avait participé à la grève illégale. De fait, les répercussions économiques de la pénalité imposée à l’AUPE se situaient, selon la Cour, entre 1,65 et 2,5 millions de dollars canadiens. La Cour a estimé que la Commission avait rejeté cet argument à juste titre. L’AUPE ayant soutenu et encouragé la grève illégale et, compte tenu des risques que la grève a fait peser sur le système de santé, il n’était pas déraisonnable d’en faire assumer les conséquences à l’ensemble du syndicat. Par ailleurs, la Cour a refusé de se prononcer sur la durée de la suspension, considérant que cette décision relève des pouvoirs discrétionnaires de la Commission.

Enfin, la Cour a conclu que l’analyse constitutionnelle de l’article 114 effectuée par la Commission était correcte. Bien que la suspension des cotisations puisse représenter un lourd fardeau pour un syndicat (et pourrait, dans l’abstrait, constituer une entrave substantielle aux droits garantis par l’alinéa 2d) de la Charte), la Cour a convenu qu’une telle suspension n’empêcherait pas les membres du syndicat de se réunir pour poursuivre des objectifs communs. L’article 114 a une portée et une durée limitées, de sorte qu’il ne contrevient pas à la Charte. La Cour a souligné que cet article ne vise qu’à sanctionner un comportement illégal, et ce, pour une durée limitée. La Cour a expliqué que, pour conclure que l’article 114 entrave de manière significative les droits garantis par la Charte, il faudrait abaisser considérablement le critère d’atteinte, au point que l’alinéa 2d) créerait une zone d’immunité pour la conduite illégale d’un syndicat. Étant donné que l’article 114 suspend seulement — et ne modifie pas — l’obligation de percevoir des cotisations en vertu de la convention collective entre l’AUPE et l’AHS, il est fondé dans les choix de politique constitutionnelle dont dispose la législature de l’Alberta.

Points à retenir pour les employeurs

L’affaire AUPE v. AHS est une victoire importante pour les employeurs du secteur public dont la main-d’œuvre est syndiquée, puisqu’elle confirme les conséquences réelles d’une grève sauvage illégale. Les syndicats du secteur public de l’Alberta qui assurent des services essentiels devraient tirer les leçons de cette affaire, et reconnaître que la lourde sanction pécuniaire imposée à l’AUPE a pour but d’envoyer un message, selon les termes de la Commission, que « ce genre de comportement ne sera pas toléré ».

En outre, l’analyse constitutionnelle adoptée par la Commission et la Cour constitue une approche raisonnée et tempérée des droits garantis par l’alinéa 2d) de la Charte, que les tribunaux canadiens n’ont pas toujours traités de manière cohérente ou prévisible. Cette décision respecte la capacité du législateur de pénaliser la conduite illégale des syndicats par des mesures temporaires, sans constituer une entrave substantielle aux droits de liberté d’association garantis par la Charte. Comme l’a fait remarquer le juge Teskey, les syndicats ne jouissent d’aucune « immunité » contre les conséquences d’une activité illégale.

Si vous avez des questions sur l’un ou l’autre des sujets abordés dans ce billet, ou si nous pouvons vous aider à conseiller votre entreprise sur des sujets similaires ou autres concernant le travail, veuillez communiquer avec l’un des auteurs ou un autre membre du groupe Droit du travail et de l’emploi de Bennett Jones pour obtenir de plus amples renseignements.

 

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Note : Cette traduction a été générée par l’intelligence artificielle.