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Ententes d’auto-incrimination et de règlement

27 juillet 2017

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Écrit par James J. Heelan QC and Mathieu J. LaFleche

L’inconduite dans le secteur des valeurs mobilières peut donner lieu à une responsabilité à la fois criminelle et réglementaire. L’un des problèmes qui découlent de ce chevauchement est la possibilité d’auto-incrimination forcée par l’État. Dans le contexte criminel, l’accusé n’est pas un témoin contraignable. Dans le contexte des valeurs mobilières, c’est le contraire. Une personne faisant l’objet d’une enquête peut être contrainte de fournir des preuves incriminantes contre elle-même. Un tel témoignage est généralement protégé contre toute utilisation dans toute procédure criminelle ultérieure par l’opération de la Charte canadienne des droits et libertés.

L’un des domaines qui suscitent une controverse continue est l’incidence de la conclusion d’une entente de règlement avec un organisme de réglementation des valeurs mobilières. Un membre faisant l’objet d’une enquête qui s’installe renonce-t-il à son droit à la protection contre l’auto-incrimination?

Vimal Iyer et le plus long procès devant jury de l’histoire de l’Alberta

Une décision récemment rendue par la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta fournit des indications sur cette question. À la fin de 2016, après ce qui a été le plus long procès devant jury de l’histoire de l’Alberta, Vimal Iyer a été condamné à sept ans de prison pour fraude. Cette fraude était liée à une série d’investissements immobiliers. M. Iyer avait également été poursuivi par l’Alberta Securities Commission (ASC). L’instance de LPC a porté sur certains des mêmes motifs que les procédures criminelles subséquentes. Avant le procès, M. Iyer avait conclu une entente de règlement pour régler les procédures intentées par l’ASC. À la suite de la détermination de la peine, les interdictions de publication d’un certain nombre de décisions provisoires rendues par le juge qui présidait le procès ont été levées. Parmi ces décisions récemment publiées figurait une décision qui examinait si l’entente de règlement pouvait être présentée en preuve au procès dans le cadre de l’instance criminelle.

La Cour a statué que la mise en preuve de l’entente de règlement ne serait pas conforme au principe de justice fondamentale protégeant une personne contre l’auto-incrimination. La Cour a statué que la Couronne ne pouvait pas présenter l’entente à titre de preuve principale.

La décision de la Cour et la Charte

Pour en arriver à sa conclusion, la Cour a statué que la Charte était en place pour protéger les personnes contre l’indirectement contrainte de s’incriminer. Dans un sens, M. Iyer n’était pas tenu de conclure l’entente de règlement, car il aurait pu se présenter à une audience en vertu de la Loi sur les valeurs mobilières pour que les allégations portées contre lui soient tranchées. La Cour n’a pas adopté une vision aussi étroite de ce que signifie être contraint. La Cour a noté que M. Iyer avait déjà été contraint de fournir des documents à un enquêteur de l’ASC et d’être interrogé par lui. Cette enquête a mené à la délivrance d’un avis d’audience. Face à cet avis d’audience, M. Iyer a conclu l’entente de règlement. En fin de compte, l’ASC aurait pu émettre un avis pour obliger M. Iyer à témoigner à l’audience. La Cour a souligné que l’entente a permis d’accomplir ce qu’une audience aurait fait. Compte tenu de cette situation, les déclarations contenues dans l’accord de règlement étaient « forcées ». Ils ont donc été protégés contre l’utilisation contre lui dans la procédure pénale qui a suivi.

Leçons sur la négociation d’une entente de règlement

Cette décision offre un certain réconfort et une certaine orientation dans la négociation d’une entente de règlement lorsqu’il y a la perspective de poursuites criminelles futures, en ce que :

  1. Toute déclaration faite dans le cadre d’une entente de règlement sera probablement protégée contre toute utilisation dans des procédures criminelles subséquentes si la solution de rechange de la partie à la conclusion d’une entente de règlement doit faire l’objet d’une audience au cours de laquelle elle sera contrainte de témoigner.
  2. Les parties au règlement devraient donc attendre qu’un avis d’audience soit émis par l’organisme de réglementation des valeurs mobilières avant de conclure une entente de règlement.
  3. Les parties à un règlement devraient continuer d’insister pour que toute entente de règlement contienne des clauses qui qualifient tout aveu comme étant aux seules fins de l’instance réglementaire. Bien qu’une telle clause ne soit pas nécessairement contraignante, elle peut limiter la fiabilité de la preuve de l’entente de règlement.

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