L’OCRCVM propose des lignes directrices pour la vérification diligente de la souscription

18 mars 2014

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Écrit par David F. Phillips, J. Paul D. Barbeau and Eric Chernin

Le 6 mars 2014, l’Organisme canadien de réglementation du commerce des placements (OCRCVM) a publié un projet de directive énonçant neuf principes clés pour la diligence raisonnable en matière de souscription.

Le rôle des souscripteurs et la défense de diligence raisonnable

Les preneurs fermes peuvent être tenus responsables d’une réclamation de dommages -intérêts (pour compenser la perte) ou d’annulation (un prix de retour d’achat) s’il y a une fausse déclaration dans un prospectus. Toutefois, un preneur ferme est à l’abri de toute responsabilité s’il a mené une enquête raisonnable sur les faits importants qui sous-tendent l’information contenue dans le prospectus. C’est ce qu’on appelle l’établissement de la « défense de diligence raisonnable ». Dans le cadre d’un appel public à l’épargne, chaque preneur ferme communique qu’il a entrepris une enquête raisonnable en certifiant qu’au meilleur de sa connaissance, de son information et de sa conviction, le prospectus constitue une divulgation complète, véridique et simple de tous les faits importants relatifs aux titres offerts.

Lignes directrices proposées

Les lois provinciales sur les valeurs mobilières dans l’ensemble du Canada reconnaissent qu’une diligence raisonnable significative dépend des détails de l’émetteur et du placement et, par conséquent, ne fournit aucune indication claire sur ce qui constitue une « enquête raisonnable ». Bien que les tribunaux canadiens aient examiné la défense de diligence raisonnable dans divers jugements, la nature spécifique des faits de ces affaires ne se prête pas bien à une large application des principes de diligence raisonnable. L’OCRCVM reconnaît que le processus de diligence raisonnable est très contextuel. Les lignes directrices proposées ne visent pas à créer une norme objective de ce qui constitue une diligence raisonnable, ni à créer de nouvelles obligations juridiques ou à modifier des obligations juridiques existantes. Néanmoins, les lignes directrices proposées fournissent une orientation précieuse aux souscripteurs en abordant le niveau approprié de diligence raisonnable requis pour s’acquitter de leur rôle de gardiens des marchés financiers, se protéger contre les atteintes à la réputation et établir la défense de diligence raisonnable prévue par la loi.

Sous-jacente à l’orientation spécifique se trouve le thème selon lequel la diligence raisonnable devrait être adaptée à l’émetteur en question, à l’industrie dans laquelle elle exerce ses activités et au type de titre offert. On s’attend à ce que les souscripteurs exercent un jugement professionnel pour déterminer le niveau approprié de diligence raisonnable dans chaque ensemble de circonstances.

Les lignes directrices proposées énoncent les principes suivants :

  1. Politiques et procédures des souscripteurs en matière de diligence raisonnable en matière de souscription – On s’attend à ce que chaque souscripteur ait des politiques et des procédures écrites relatives à tous les aspects du processus de souscription. Ces politiques et procédures devraient reconnaître qu’une enquête raisonnable implique, pour chaque offre, une détermination contextuelle et l’exercice d’un jugement professionnel. Les listes de contrôle prescriptives sont déconseillées. Les politiques et les procédures devraient établir le processus à suivre lorsque des signaux d’alarme indiquent qu’une diligence raisonnable accrue est nécessaire.
  2. Plans de diligence raisonnable – Le preneur ferme devrait avoir un plan de diligence raisonnable spécifique à l’accord qui reflète le contexte de l’offre et le niveau de diligence raisonnable qui sera raisonnable dans les circonstances. De plus, un plan de diligence raisonnable sera nécessairement itératif et susceptible de changer à mesure que les circonstances changeront. Le plan devrait relever le défi unique de faire preuve de diligence raisonnable pendant la période comprimée d’une offre de « prise ferme », en particulier pour les membres non principaux du syndicat.
  3. Séances de questions et réponses sur la diligence raisonnable – Il est courant que des séances de questions et réponses soient tenues avec la direction et ses conseillers professionnels à des moments appropriés pendant le processus d’offre. Toutefois, on craint que ces séances ne soient trop formulées et que des enquêtes significatives et indépendantes ne soient pas menées. Les questions propres à l’émetteur et à la transaction doivent être rédigées après avoir effectué une diligence raisonnable importante et examiné les dossiers de divulgation publique de l’émetteur. Les réponses incomplètes ou évasives devraient déclencher des questions de suivi, auxquelles il faut répondre de façon satisfaisante avant d’certifier le prospectus définitif. Tous les membres du syndicat de souscription devraient être habilités à participer au processus de diligence raisonnable, et en particulier aux séances de questions et réponses.
  4. Diligence raisonnable de l’entreprise – Le souscripteur doit faire preuve d’une diligence raisonnable d’entreprise suffisante pour s’assurer qu’il comprend les activités de l’émetteur et les facteurs clés qui influent sur les activités de l’émetteur. La diligence adéquate peut inclure des visites sur place, des entrevues avec des conseillers professionnels, des clients et des tiers, l’examen des données opérationnelles et, dans le cas des émetteurs étrangers ou des marchés émergents, une étude de l’environnement politique et culturel. Une diligence raisonnable accrue peut être requise lorsqu’il y a eu des changements importants dans les activités, les actifs ou les activités de l’émetteur, lorsque les traitements comptables sont inhabituels ou incompatibles avec les pairs de l’industrie, lorsqu’il y a eu une activité de négociation inhabituelle de la part de l’émetteur ou par des initiés ou lorsque la controverse entoure les mandants (y compris les questions soulevées par les investisseurs institutionnels). Les souscripteurs doivent être au courant des signaux d’alarme, y compris le défaut de fournir les renseignements demandés, tout retard indu ou tout défaut de faciliter une visite sur place et les répondants qui évitent ou détournent les questions directes. Ce sont les souscripteurs, et non la direction, qui devraient contrôler la circulation de l’information.
  5. Diligence raisonnable juridique – Le souscripteur principal devrait discuter avec le conseiller juridique des preneurs fermes de la portée de la diligence raisonnable juridique que l’avocat effectuera, et le plan de diligence raisonnable devrait clairement définir les rôles respectifs des souscripteurs et de leurs avocats. De plus, les souscripteurs devraient assurer une supervision adéquate de la diligence raisonnable juridique exercée par les avocats des souscripteurs. Tous les membres du syndicat devraient avoir accès à l’avocat des souscripteurs pour s’assurer qu’une diligence raisonnable juridique suffisante a été exercée.
  6. Recours des preneurs fermes à des experts et à d’autres tiers – Les lois sur les valeurs mobilières prévoient que les preneurs fermes ne sont pas responsables d’une fausse déclaration à l’égard de toute partie experte d’un prospectus, à condition qu’ils n’aient aucun motif raisonnable de croire qu’il y a eu une fausse déclaration. Les lignes directrices proposées mettent en garde contre le fait que la mesure dans laquelle un souscripteur peut compter sur un expert dépend des qualifications, de l’expertise, de l’expérience, de l’indépendance et de la réputation de cet expert. Même lorsque les qualifications des experts ont été vérifiées, la confiance ne devrait pas être aveugle face aux signaux d’alarme.
  7. Confiance des membres du syndicat à l’égard du preneur ferme principal – Étant donné que chaque membre du syndicat est assujetti à la même responsabilité pour une fausse déclaration de prospectus, un membre du syndicat doit s’assurer que le preneur ferme principal a effectué le genre d’enquête de diligence raisonnable que le membre du syndicat aurait effectuée en son propre nom en tant que souscripteur principal. Les lignes directrices proposées ne visent pas à réaffecter ou à entraîner un dédoublement des responsabilités en matière de diligence raisonnable entre le souscripteur principal et un membre du syndicat. Cependant, chaque membre du syndicat devrait recevoir des copies de toutes les lettres, opinions ou notes de service relatives à l’enquête de diligence raisonnable des souscripteurs. Le fait de s’appuyer sur la diligence raisonnable exercée par le preneur ferme principal dans le cadre d’un placement de prise ferme présente des défis pour les autres membres du syndicat qui ont des recours limités s’ils concluent que la diligence raisonnable du chef de file n’a pas été adéquate.
  8. Tenue de registres de diligence raisonnable par les preneurs fermes – Chaque preneur ferme doit documenter le processus de diligence raisonnable afin d’être en mesure de démontrer qu’il a mené une enquête de diligence raisonnable, qu’il a suivi ses propres politiques et procédures et qu’il s’est conformé aux exigences de l’OCRCVM et aux obligations en matière de tenue de documents en vertu des lois sur les valeurs mobilières applicables. Les polices du souscripteur doivent décrire les documents qui doivent être conservés dans le fichier de transaction.
  9. Le rôle de la supervision et de la conformité dans le processus de prise ferme – Chaque preneur ferme est tenu, en vertu des Règles des courtiers membres de l’OCRCVM, de mettre en place un cadre de surveillance et de conformité complet et efficace pour assurer la conformité aux politiques et aux procédures, aux exigences de l’OCRCVM et aux lois sur les valeurs mobilières applicables. La fonction de surveillance devrait être dirigée par un professionnel principal des services bancaires d’investissement qui est ultimement responsable de la qualité et de l’étendue de la diligence raisonnable exercée ou par un comité de gestionnaires principaux de services bancaires d’investissement, de conseillers internes et / ou de personnel de conformité qui peuvent exercer un jugement indépendant.

Préoccupations d’ordre pratique

  1. Motifs de litige – Nous sommes d’avis que, bien que les lignes directrices proposées fournissent un cadre utile, elles présentent également aux demandeurs un point de repère par rapport auquel ils peuvent évaluer la suffisance de la diligence raisonnable exercée par les souscripteurs.
  2. Le paradoxe de la diligence raisonnable – L’obligation d’effectuer une diligence commerciale et juridique plus étendue pour les émetteurs juniors, peu fréquents et des marchés émergents crée un « paradoxe de la diligence raisonnable », où les petites offres avec les plus grandes sensibilités aux coûts nécessitent le niveau de diligence le plus approfondi. Les preneurs fermes devraient entreprendre une analyse des risques et des rendements avant de s’engager à souscrire une offre.
  3. Le dilemme de la diligence raisonnable – Les souscripteurs sont également confrontés à un dilemme dans le contexte des offres abrégées accélérées où il n’y a pas suffisamment de temps pour mener à bien une enquête raisonnable. Il a été suggéré que les preneurs fermes peuvent résoudre ce dilemme en effectuant une diligence raisonnable continue d’un émetteur et de son secteur d’activité même lorsque l’émetteur n’est pas « en distribution ». Toutefois, une telle exigence peut être irréalisable, car les preneurs fermes s’opposeront à engager de tels coûts sans avoir l’assurance qu’ils participeront à tout placement à venir, et encore moins qu’ils seront désignés comme le souscripteur principal.
  4. Indemnité de souscripteur inadéquate – Une indemnisation contractuelle convenue dans la convention de souscription peut avoir une valeur limitée pour les souscripteurs, car elle peut être difficile en pratique à appliquer (si le souscripteur n’a pas établi la défense de diligence raisonnable) ou sans valeur (si l’émetteur n’a plus rien à la suite de réclamations directes contre lui). Dans les cas moins graves, les souscripteurs peuvent être en concurrence avec d’autres demandeurs pour des ressources limitées, et l’émetteur peut résister à toutes les réclamations par le biais d’un litige. Les souscripteurs ne devraient pas présumer que les dispositions relatives à l’indemnisation offriront une protection totale.

Il est temps de formuler des commentaires

L’OCRCVM a sollicité des commentaires à l’égard des prévisions proposées d’ici le 4 juin 2014.

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