Les règles de transparence des revenus tirés des ressources du Canada sont maintenant en vigueur

01 juin 2015

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Écrit par Eden M. Oliver

La nouvelle Loi sur les mesures de transparence dans le secteur extractif1 du Canada a été proclamée en vigueur aujourd’hui2, conformément à l’échéancier engagé par le gouvernement fédéral. La Loi impose des exigences de déclaration obligatoires pour chaque entité engagée dans la « mise en valeur commerciale du pétrole, du gaz ou des minéraux » (exploration, extraction ou avoir des permis pour le faire) au Canada ou ailleurs ou qui contrôle une entité qui est ainsi engagée. Conformément aux efforts mondiaux de lutte contre la corruption dans le secteur de l’extraction, la Loi constitue une étape importante dans l’engagement du Canada à établir des normes de déclaration obligatoires pour le secteur de l’extraction « en vue d’accroître la transparence des paiements qu’il verse aux gouvernements ». 3

L’initiative fait partie d’une tendance mondiale plus large qui défend une plus grande transparence et responsabilité au sein des industries extractives, l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives ayant établi des principes d’enracinement dans la Norme ITIE. 4 Aux États-Unis, la Securities and Exchange Commission élabore des exigences de déclaration obligatoire pour le secteur de l’extraction en vertu de l’article 1504 de la Dodd-Frank Wall Street Reform and Consumer Protection Act. 5 Ces règles ne sont pas prévues avant le printemps 2016. L’Union européenne a également entrepris d’établir des exigences par le biais de ses directives sur la comptabilité et la transparence. 6 En les mettant en œuvre, le Royaume-Uni a adopté le Règlement de 2014 sur les rapports sur les paiements aux gouvernements exigeant que les sociétés extractives divulguent publiquement les paiements qu’elles effectuent aux gouvernements à compter du 1er janvier 2015. 7

La Loi exigera que certaines entités déposent un rapport divulguant les paiements qu’elles ou leurs filiales ont faits à un gouvernement canadien ou étranger totalisant au moins 100 000 $ CA (ou un autre montant prescrit) pour certaines catégories de paiements énumérées. Chacune de ces entités sera tenue de déposer un rapport chaque année au plus tard 150 jours après la fin de son exercice financier.

Les entités seront d’abord tenues de se conformer à la Loi pour leur prochain exercice financier suivant celui en cours. Cela signifie que les entités dont l’exercice financier se termine le 31 décembre devront se conformer pour l’exercice commençant le 1er janvier 2016 et déposer un rapport d’ici le 29 mai 2017 pour les paiements effectués au cours de 2016.

Notamment, les paiements versés aux gouvernements autochtones du Canada seront exemptés jusqu’au 31 mai 2017. Entre-temps, des consultations sont en cours pour déterminer si de tels paiements devraient être visés par la loi.

Les entités nationales et étrangères qui explorent ou extraient du pétrole, du gaz ou des minéraux directement ou par l’entremise de leurs filiales et qui ont un lien avec le Canada devraient examiner si les règles s’appliquent à celui-ci. Si c’est le cas, ils devraient se préparer à s’y conformer.

Les règles

1. Qui sera tenu de faire rapport?

L’obligation de déclarer s’applique aux entités a) inscrites à la bourse de valeurs canadiennes, ou b) ayant un lieu d’affaires au Canada, qui exercent des activités au Canada ou qui ont des actifs au Canada et qui, d’après leurs états financiers consolidés, remplissent deux des trois conditions suivantes pour au moins un de leurs deux exercices financiers les plus récents (en dollars canadiens) : i) avoir un actif d’au moins 20 millions de dollars; (ii) générer des revenus annuels d’au moins 40 millions de dollars; et iii) employer en moyenne au moins 250 employés. (Il est à noter qu’il s’agit d’états financiers consolidés et que les conditions (i)-(iii) ne se limitent pas aux actifs, aux revenus ou aux employés canadiens.)

De plus, un paiement effectué par une entité qui n’est pas visé par les exigences de déclaration de la Loi (parce qu’il ne satisfait pas au critère énoncé ci-dessus) qui est contrôlé par une autre entité sera réputé avoir été effectué par l’entité contrôlante. L’effet recherché est d’inclure les paiements collectifs d’une famille de sociétés dans l’évaluation si le seuil de paiement en dollars applicable a été dépassé.

La Loi prévoit des rapports consolidés dans les cas impliquant des filiales en propriété exclusive. En particulier, lorsqu’une entité et une filiale en propriété exclusive de l’entité sont visés par les exigences de la Loi, la filiale sera réputée avoir fourni un rapport si : a) l’entité fournit au ministre un rapport qui contient des renseignements relatifs aux paiements effectués par la filiale au cours de son exercice financier; b) au plus tard 150 jours après la fin de son exercice financier, la filiale avise par écrit le ministre que l’entité mère fournira le rapport; et c) la filiale fournit au ministre un rapport indiquant tout paiement qu’elle a effectué au cours de son exercice financier qui n’est pas visé par le rapport fourni par l’entité mère.

2. Quels paiements doivent être déclarés?

La Loi exige que les entités déclarent tous les paiements (qu’ils soient monétaires ou en nature) totalisant 100 000 $ (ou un autre montant prescrit) ou plus dans une catégorie de paiements versées à un gouvernement au Canada ou dans un État étranger, à un organisme établi par deux gouvernements ou plus ou à un organisme établi pour exercer une fonction gouvernementale. Voici les catégories de paiements qui doivent être déclarés :

La déclaration en vertu de la Loi n’est pas requise si les paiements de chaque catégorie n’atteignent pas ou ne dépassent pas le seuil de 100 000 $ (ou un autre montant prescrit), même si le total combiné de tous les paiements dans toutes les catégories dépasse 100 000 $ (ou un autre montant prescrit). Le ministre peut préciser la forme et le mode de présentation des rapports, ce qui peut inclure l’obligation de faire rapport au niveau du projet.

3. Qu’est-ce que le processus de production de rapports?

La Loi précise que toute entité doit, dans les 150 jours suivant la fin de chaque exercice financier, fournir au ministre un rapport indiquant les paiements qu’elle a effectués ou qu’elle est réputée avoir effectués au cours de cette année. Le rapport doit comprendre une attestation d’un administrateur ou d’un dirigeant de l’entité, ou d’un vérificateur ou d’un comptable indépendant, indiquant que les renseignements contenus dans le rapport sont véridiques, exacts et complets.

Les entités seront tenues de mettre à la disposition du public toute information requise par le règlement ou, si aucun règlement n’est pris, de mettre le rapport et toute autre information divulguée à la disposition du public. Le rapport et l’information devront être mis à la disposition du public pendant cinq ans (ou toute autre période prescrite). La Loi impose également aux entités l’obligation de tenir des registres des paiements, qui doivent être conservés pendant sept ans (ou toute autre période prescrite) à compter de la date à laquelle l’entité divulgue son rapport.

La Loi prévoit l’acceptation des rapports préparés conformément aux exigences de déclaration proportionnelles d’autres administrations. Plus précisément, la Loi confère au ministre le pouvoir discrétionnaire d’examiner et de déterminer si les exigences en matière de rapports d’une autre administration sont un substitut acceptable à celles contenues dans la Loi. Si le ministre détermine que les exigences en matière de déclaration d’une autre administration constituent un substitut acceptable, une entité sera réputée avoir fourni un rapport si elle : a) fournit le rapport exigé par la juridiction étrangère à son autorité compétente; b) fournit une copie de ce rapport au ministre dans le délai prescrit par les exigences de déclaration de l’administration étrangère; et c) se conforme à toute autre condition imposée par le ministre.

4. Comment la loi sera-t-elle appliquée?

Le ministre désignera des personnes chargées d’administrer et d’appliquer la loi, et un large éventail de pouvoirs d’enquête sont conférés à ces personnes désignées. La Loi confère également au ministre le pouvoir d’émettre des ordonnances pour vérifier la conformité d’une entité à la Loi. En vertu d’une telle ordonnance, une entité peut, entre autres choses, être tenue : a) d’énumérer ses projets; b) expliquer comment certains paiements ont été traités aux fins de la préparation de son rapport; c) divulguer les politiques qu’il a mises en œuvre à des fins de conformité; et d) fournir au ministre les résultats d’une vérification de son rapport ou des registres des paiements effectués pour l’exercice auquel le rapport se rapporte. Ces audits doivent être effectués par un auditeur indépendant conformément aux normes d’audit généralement reconnues spécifiées dans l’ordre.

Si, d’après les renseignements fournis par l’entité et toute enquête menée en vertu de la loi, le ministre est d’avis qu’une entité ne se conforme pas, il a le pouvoir discrétionnaire d’exiger de l’entité qu’elle prenne les mesures qu’il juge nécessaires pour assurer la conformité à la Loi.

5. Que se passe-t-il si une entité omet de faire rapport?

Le défaut de se conformer aux exigences de la Loi fera l’objet de sanctions potentiellement importantes. Plus précisément, le défaut de signaler, de mettre les rapports et l’information à la disposition du public et de tenir des registres, au besoin, constituera une infraction en vertu de la loi. Ce serait également une infraction de (a) faire sciemment des déclarations fausses ou trompeuses ou (b) structurer les paiements dans l’intention d’éviter les exigences de déclaration. Une entité ou une personne qui contrevient à ces exigences se rendra coupable d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire et passible d’une amende maximale de 250 000 $. De plus, si une infraction à la Loi est commise ou se poursuit plus d’une journée, elle constituera une infraction distincte pour chaque jour où l’infraction est commise ou poursuivie. Enfin, les dirigeants et les administrateurs d’une entité qui dirigent, autorisent, acquiescent, acquiescent ou participent à la perpétration d’une telle infraction seront considérés comme coupables et passibles de la peine prévue pour l’infraction. Toutefois, en vertu de la Loi, une personne ou une entité ne sera pas déclarée coupable si elle établit qu’elle a fait preuve de diligence raisonnable pour empêcher la perpétration de l’infraction.

Prochaines étapes

Depuis le dépôt et l’adoption de la Loi en décembre 2014, un certain nombre de problèmes de mise en œuvre ont été cernés par l’industrie et discutés avec Ressources naturelles Canada, en particulier par un groupe de travail consultatif. La Loi sera complétée par des directives et des règlements administratifs, que nous prévoyons publier au début de l’été.

Pour obtenir de plus amples renseignements et de l’aide sur l’évaluation et le respect de vos obligations en matière de conformité, veuillez communiquer avec nous.

Remarques :

  1. Projet de loi C-43, Loi sur le plan d’action économique de 2014, no 2, 2e sess, 41e léc. 2014, cl 376 [section 28, article 6], maintenant Loi sur le plan d’action économique de 2014, LS 2014, ch. 39, article 376 [projet de loi C-43].
  2. http://www.newswire.ca/en/story/1546963/harper-government-delivers-on-commitment-to-enhance-transparency-of-extractive-industry
  3. Ressources naturelles Canada, Document de consultation « Établir des normes de déclaration obligatoires pour le secteur de l’extraction » (printemps 2014), à la section 1, en ligne : Ressources naturelles Canada. [Document de consultation].
  4. https://www.eiti.org 
  5. Dodd-Frank Wall Street Reform and Consumer Protection Act, Pub. L. No. 111-203, 124 Stat. 1376, HR 4173, s 1504 (2010).
  6. Directive comptable 2013/34/UE, du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013. Directive transparence 2013/50/UE, du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2013 modifiant la directive 2004/109/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 2004. Les États membres sont tenus de promulguer une législation de mise en œuvre d’ici le 20 juillet 2015 pour les exercices commençant le 1er janvier 2016 ou au cours de l’année 2016.
  7. http://www.legislation.gov.uk/uksi/2014/3209/contents/made

Liens connexes

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