La Cour d’appel de l’Alberta établit un équilibre entre le droit à la vie privée et la liberté d’expression

10 juillet 2012

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Le 20 avril 2012, la Cour d’appel de l’Alberta a rendu sa décision dans l’affaire United Food and Commercial Workers, Local 401 v Alberta (Attorney General)1, clarifiant le traitement des droits à la vie privée prévus par la loi 2 de la Personal Information Protection Act2de l’Alberta par rapport au droit à la liberté d’expression garanti par la Charte canadienne des droits et libertés. Dans cette décision, la Cour a statué que la capacité d’un syndicat, entre autres, de faire et de distribuer des images enregistrées de personnes franchissant une ligne de piquetage était protégée en tant que droit d’expression en vertu de la Charte et l’emportait sur le droit à la vie privée de ces personnes en vertu de la Loi. La Cour, plus particulièrement, a également statué que la Loi était inconstitutionnelle et que les protections accordées en vertu de celle-ci ne peuvent être assimilées à une constitutionnalité.

Contexte

Au cours d’une grève au Casino Palace à Edmonton, le Syndicat de la section locale 401 des Travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce (TUAC) a pris des enregistrements vidéo et photo de la ligne de piquetage et a affiché des affiches dans le secteur indiquant que des images de ceux qui ont franchi la ligne de piquetage pourraient être mises en ligne. Un arbitre nommé par le commissaire à l’information et à la protection de la vie privée de l’Alberta en vertu de la Loi a conclu que la collecte ou l’utilisation de renseignements personnels par les TUAC, sauf pour les utiliser dans le cadre d’une enquête ou d’une procédure judiciaire, contrevenait à la Loi. Les TUAC ont par la suite demandé le contrôle judiciaire de cette décision. D’accord avec les TUAC, le juge siégeant en cabinet a conclu que la Loi limitait « délibérément et directement » la liberté d’expression des TUAC et a déclaré certaines parties de la Loi inconstitutionnelles. Le procureur général de l’Alberta a interjeté appel de cette décision devant la Cour d’appel de l’Alberta.

La décision de la Cour

Comme la Cour suprême du Canada avait déjà statué que la liberté d’expression englobe la capacité de recueillir des renseignements qui doivent être distribués lorsque la distribution constitue une activité d’expression, la Cour d’appel a conclu que l’interdiction des tuacs de traiter avec les enregistrements de leur ligne de piquetage constituait une atteinte directe à leur liberté d’expression.

Bien que la Cour ait reconnu l’importance considérable de protéger les attentes raisonnables de la société en matière de vie privée et de limiter l’utilisation abusive des renseignements personnels, elle a souligné que l’application de la Loi doit tenir compte de son incidence sur le droit à la liberté d’expression protégé par la Charte. En fait, elle a conclu que la protection des renseignements personnels n’est pas plus importante que la négociation collective, les droits des travailleurs de se syndiquer et le droit du syndicat de communiquer son message au public.

En évaluant la constitutionnalité de la Loi, la Cour a conclu que la Loi était trop large en raison de ce qui suit :

Par conséquent, la Cour a confirmé l’ordonnance du juge de la Chambre annulant les parties offensantes de la décision de l’arbitre et s’est renvoyée à l’Assemblée législative de l’Alberta pour qu’elle apporte les modifications appropriées à la Loi afin de la rendre conforme à la Charte.

Implications

Le commissaire à l’information et à la protection de la vie privée de l’Alberta a demandé l’autorisation d’interjeter appel de la décision de la Cour devant la Cour suprême du Canada.3 Dans l’éventualité où l’autorisation n’est pas accordée, cette décision circonscrira les protections de la vie privée prévues par la Loi et aura donc un effet important sur cette loi, ainsi que sur d’autres lois qui sont essentiellement similaires à celles-ci. 4 Par conséquent, les entreprises sont encouragées à : (i) surveiller les développements possibles en ce qui concerne cette décision à la Cour suprême et à l’Assemblée législative de l’Alberta; et (ii) modifier leurs politiques de confidentialité en conséquence.


Remarques :
  1. 2012 ABCA 130.
  2. LS 2003, ch. P-6.5.
  3. http://www.oipc.ab.ca/Content_Files/Files/News/NR_UFCW_SCC_Jun_4_2012.pdf
  4. Par exemple, la Personal Information Protection Act de la Colombie-Britannique, SBC 2003, ch. 63 et la Personal Information Protection and Electronic Documents Act, SC 2000, ch. 5.

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