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La prépondérance des inconvénients dans les demandes de contrôle judiciaire — Une leçon dans le domaine du cannabis

07 novembre 2019

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Écrit par Gavin Finlayson and Ethan Schiff

Dans les demandes de contrôle judiciaire, la décision de la cour de révision d’accorder une réparation est discrétionnaire, même si le demandeur présente sa cause sur le fond (bien que le tribunal accorde généralement une réparation corrective lorsque la cause est fondée sur le fond). De plus, le demandeur est généralement limité aux éléments de preuve et aux documents qui ont été présentés à l’administrateur, et (sous réserve d’exceptions limitées , comme la preuve allant à la partialité) l’autorisation est requise avant que de nouveaux éléments de preuve ne soient présentés.

Comment la cour de révision utilise-t-elle son pouvoir discrétionnaire de réparation lorsque la réparation demandée peut porter atteinte aux droits des tiers, et quel rôle la preuve extrinsèque joue-t-elle dans l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire? Ces problèmes se sont produits récemment dans Reynolds v Registrar (Alcohol and Gaming Commission), 2019 ONSC 5571, où la Cour divisionnaire de l’Ontario a souligné le large éventail de facteurs que les tribunaux peuvent prendre en compte dans l’exercice de leur pouvoir discrétionnaire d’accorder un recours en droit administratif. La décision confirme qu’il est avantageux d’être proactif lorsque le contrôle judiciaire d’une autre partie peut avoir une incidence sur les droits de vos clients. Les demandeurs de contrôle judiciaire doivent également examiner attentivement le dépôt d’éléments de preuve de préjudice si la réparation demandée peut avoir une incidence sur les droits des tiers.

Dans l’affaire Reynolds, les demandeurs ont demandé le contrôle judiciaire de la décision du registraire de la Commission des alcools et des jeux de l’Ontario (CAJO) de les empêcher de demander un nombre limité de licences de vente au détail de cannabis disponibles en Ontario, après avoir obtenu le droit de présenter une demande par l’entremise de la deuxième loterie des licences de cannabis de la CAJO. La demande tournait autour de l’interprétation des règles de la CAJO exigeant que les demandeurs livrent une lettre de crédit originale dans les cinq jours suivant l’avis qu’ils figuraient parmi les gagnants de la loterie. Les demandeurs ont fait valoir qu’ils n’avaient pas reçu d’avis de la CAJO à la date de notification parce que les courriels envoyés par la CAJO aux adresses de courriel fournies par les demandeurs « ont rebondi », et que les tentatives subséquentes réussies de les aviser devraient être prises pour prolonger le délai de conformité. Le registraire a conclu que les demandeurs n’avaient pas soumis leurs lettres de crédit originales dans les cinq jours suivant l’envoi des courriels originaux et qu’ils avaient donc été disqualifiés. Les demandeurs ont demandé une ordonnance de certiorari annulant la décision d’inhabilité du registraire et les réinsmettant sur la « liste sélectionnée », ce qui nécessiterait de retirer les tiers « suivants » que la CAJO a invités à demander des licences après que les demandeurs ont été jugés non conformes.

La Cour divisionnaire a statué que la décision du registraire de la CAJO de disqualifier les demandeurs était susceptible de contrôle selon la norme du « caractère raisonnable » (c.-à-d. que la Cour n’avait pas le droit de substituer son opinion à celle du registraire tant que la décision du registraire n’était pas déraisonnable) et a ensuite conclu que la décision du registraire était raisonnable. Selon la Cour divisionnaire, cela s’explique en grande partie par le fait que les demandeurs étaient au courant des dates et des échéanciers clés, qu’ils ont fourni des coordonnées inefficaces et qu’ils n’ont pas expliqué pourquoi leurs adresses de courriel étaient apparemment erronées et pourquoi ils ne pouvaient pas être joints par téléphone.

Bien que cette conclusion ait été suffisante pour trancher la demande, la Cour a ensuite examiné si elle aurait accordé la réparation demandée, annulant la décision d’instance inférieure, si les demandeurs avaient établi leur cause sur le fond. Pour évaluer la prépondérance des inconvénients afin de déterminer s’il était souhaitable d’accorder la réparation demandée, la Cour a tenu compte de l’incidence de la réparation demandée sur les tiers « suivants ». Ces tiers sont intervenus dans la demande et ont présenté des éléments de preuve du préjudice substantiel et irrévocable qui résulterait si le tribunal accordait la réparation demandée par les demandeurs (comme faire des investissements fondés sur leur inclusion sur la liste sélectionnée). En revanche, les demandeurs n’ont déposé aucune preuve de préjudice résultant de leur propre exclusion. La Cour a également comparé la conduite des intervenants (qui étaient « vraiment innocents ») à celle des demandeurs (qui, entre autres choses, n’avaient aucune explication quant à la raison pour laquelle leur adresse de courriel ne fonctionnait pas). La Cour a statué que la prépondérance des inconvénients pesait contre l’octroi de la réparation demandée, même si l’affaire avait été fondée sur le fond.

L’arrêt Reynolds démontre l’importance des répercussions des recours proposés en matière de droit administratif au-delà des principales parties. Les demandeurs qui demandent un redressement susceptible d’avoir une incidence sur des tiers devraient envisager de déposer des éléments de preuve à l’appui de la prépondérance des inconvénients. Les parties qui pourraient être touchées par la réparation demandée dans le cadre d’un contrôle judiciaire devraient envisager d’intervenir dans l’instance et de chercher à déposer des éléments de preuve, même s’ils ne sont pas nommés dans l’intitulé de la cause.

Gavin Finlayson et Ethan Schiff de Bennett Jones LLP ont représenté l’un des « prochains intervenants » sélectionnés.

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