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La Cour suprême statue que les messages textes sont des communications privées

27 mars 2013

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Dans l’arrêt R c. Telus, la Cour suprême du Canada a statué que la messagerie texte est essentiellement une autre forme de conversation et qu’elle devrait bénéficier de la même protection que les communications privées en vertu du Code criminel. La Cour a statué que les messages textes sont des communications privées, même s’ils sont stockés sur l’ordinateur d’un fournisseur de services.

Toutefois, la Cour était divisée dans ses opinions sur le type de mandat nécessaire pour que la police ait accès à un message texte, étant donné que, contrairement à la communication vocale traditionnelle, un message texte peut ou non être livré à son destinataire prévu au moment de sa création. La réception du message texte dépend si le téléphone est allumé, s’il est à portée d’une tour de téléphonie cellulaire et si l’utilisateur a accédé au message. De plus, contrairement aux communications vocales, les communications textuelles, de par leur nature, génèrent un enregistrement de la communication qui peut facilement être copié et stocké.

La réalité des technologies de communication modernes est que les communications privées électroniques, telles que les messages texte, sont souvent simultanément en transit et sous une forme ou une autre de stockage informatique par le fournisseur de services. En conséquence, la même communication privée existe à plus d’un endroit et peut donc être acquise par l’État à partir du flux de transmission et du stockage informatique. En d’autres termes, la même communication privée peut être interceptée par la police plus d’une fois à partir de différentes sources.

Les juges Abella, LeBel et Fish ont estimé qu’une interprétation étroite ou technique de l’interception en vertu du Code criminel, qui exige que l’acte d’interception se produise en même temps que la communication elle-même, n’était pas appropriée pour traiter des nouvelles communications électroniques textuelles.

La Cour a déclaré que « [35] Une définition étroite est également incompatible avec le libellé et l’objet généraux de la partie VI. La définition légale de l’interception à l’article 183 comprend trois parties distinctes « écouter, enregistrer ou acquérir ». En français, la définition inclut de prendre ... connaissance. Plutôt que de limiter la définition de l’interception à sa définition étroite et technique, la définition législative élargit le concept d’interception. La définition d’interception du Code n’exige pas que l’interception d’une communication privée soit simultanée ou contemporaine de la communication elle-même. Si le législateur avait voulu inclure une telle exigence, il l’aurait incluse dans la définition d’interception. Au lieu de cela, il a choisi d’adopter une définition plus large, conforme à l’objectif de la partie VI d’offrir une large protection aux communications privées contre l’ingérence non autorisée de l’État.

Les juges Moldaver et Karakatsanis n’ont pas jugé nécessaire de réfléchir à la définition d'«interception », car ils ont conclu que les autorités n’avaient pas établi l’une des conditions préalables nécessaires pour obtenir un mandat général et, par conséquent, elles se sont jointes aux juges Abella, LeBel et Fish pour accueillir le pourvoi.

Fait intéressant, les juges Cromwell et McLachlin, dans leur opinion dissidente, ont conclu à une distinction en vertu du Code entre l’interception, c’est-à-dire l’écoute, l’enregistrement ou l’acquisition d’une communication ou de la substance, de la signification ou du but de celle-ci, et l’utilisation ou la divulgation d’une communication privée. Les juges Cromwell et McLachlin ont conclu que lorsque Telus a fourni à la police des copies de communications textuelles de ses bases de données qu’elle avait précédemment interceptées et stockées à ses propres fins légales, elle divulguait les communications et la police n’interceptait pas les communications privées. Les juges dissidents ont conclu que le mandat général autorisant une technique différente d’une interception était suffisant.

La dissidence a fait remarquer que les communications privées stockées sont depuis longtemps accessibles à la police en vertu de mandats de perquisition ordinaires et que la décision du juge Abella irait à l’encontre d’une série d’affaires dans lesquelles les tribunaux canadiens ont conclu que les mandats de perquisition sont suffisants pour permettre à la police d’accéder à des documents et à des données stockés sur un ordinateur.

Il sera intéressant de voir comment cette décision sera appliquée à l’avenir dans le contexte des courriels et des discussions sur Internet.

http://scc.lexum.org/decisia-scc-csc/scc-csc/scc-csc/en/item/12936/index.do

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