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Demande de contrôle judiciaire préservée dans l’affaire de pénalité pour prix de transfert

01 octobre 2014

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Une décision récente de la Cour d’appel fédérale (CAF) illustre à quel point les différends litigieux en matière de prix de transfert peuvent être litigieux - même un différend dont un contribuable croyait qu’il avait été résolu! Il s’agit également d’une situation rare dans laquelle la demande de contrôle judiciaire du contribuable, alléguant des abus de la part du ministre du Revenu national, n’a pas été radiée comme le ministre l’avait demandé.

En 2007, Sifto Canada a fait une divulgation volontaire à l’ARC pour corriger le prix de transfert du sel gemme vendu à une société affiliée américaine au cours des années 2004-2006. Le programme de divulgation volontaire de l’ARC offre un allègement des pénalités et des intérêts aux contribuables qui se présentent aux autorités fiscales pour corriger les erreurs de déclaration passées et qui satisfont aux conditions du programme. La divulgation volontaire de Sifto Canada a été acceptée et les autorités compétentes du Canada et des États-Unis sont parvenues à un accord sur le prix de transfert, ce que Sifto Canada a accepté, au motif que le prix convenu était définitif et contraignant et qu’aucune pénalité ne s’appliquerait. Malgré cette entente, en 2012, le ministre a réévalué Sifto Canada pour une pénalité de 60 millions de dollars pour avoir omis de faire des efforts raisonnables pour déterminer et utiliser un prix de transfert sans lien de dépendance.

Sifto Canada a présenté deux demandes de contrôle judiciaire alléguant que la ministre avait abusé de son pouvoir discrétionnaire en émettant la nouvelle cotisation parce que la demande de divulgation volontaire qui avait été acceptée exonnuait Sifto Canada de pénalités et que le prix de transfert convenu dans le cadre de la procédure avec l’autorité compétente liait l’ARC aux fins de la Loi de l’impôt sur le revenu (en vertu du par. 115.1(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu).

Le ministre a demandé que les demandes soient radiables au motif qu’elles n’avaient aucune chance d’être tranchées. Le protonotaire saisi des demandes en première instance a refusé de radier les requêtes et la décision du protonotaire a été confirmée en appel par le ministre devant la Cour fédérale. Le ministre a également interjeté appel devant la Cour d’appel fédérale, s’appuyant sur la décision de 2013 de la CAF dans une autre affaire, JP Morgan Asset Management, qui a été rendue après la décision de la Cour fédérale dans l’affaire Sifto Canada. Dans l’affaire JP Morgan, qui comportait des allégations d’abus de pouvoir discrétionnaire de la part de l’ARC concernant les nouvelles cotisations d’impôt à la source, la CAF a semblé envoyer un message clair aux contribuables et aux conseillers fiscaux que les demandes de contrôle judiciaire sont trop courantes et ne sont souvent rien de plus que des attaques collatérales « astucieuses » et invalides contre la compétence exclusive de la Cour canadienne de l’impôt de déterminer la validité des nouvelles cotisations d’impôt.

Il est donc intéressant - et significatif - que la CAF ait refusé d’accueillir l’appel du ministre visant à radier la demande de contrôle judiciaire de Sifto Canada. (Une demande a été abandonnée au moment où l’affaire est parvenue à la CAF, de sorte que seule la demande concernant la pénalité relative aux prix de transfert a été jugée par la Cour.)  Bien que la CAF ait fait remarquer que certains aspects d’une pénalité fiscale font l’objet d’un appel devant la Cour de l’impôt, la Cour a déclaré que la Cour de l’impôt n’a pas compétence pour déterminer si le ministre a correctement exercé son pouvoir discrétionnaire de renoncer à une pénalité ou de l’annuler. Cela ne peut être tranché qu’au moyen d’une demande de contrôle judiciaire à la Cour fédérale. La CAF a également rejeté les arguments du ministre selon lesquels la demande de Sifto Canada était prématurée et invalide parce que la réparation demandée a été mal rédigée en déclarant (au paragraphe 25) que « si la demande n’est pas parfaitement rédigée à cette étape, la Cour fédérale dispose d’une grande marge de manœuvre pour permettre des modifications si nécessaire pour s’assurer que le litige réel est correctement devant la Cour ».

L’affaire Sifto Canada est une affaire importante qui confirme que les contribuables ont recours à la Cour fédérale par voie de contrôle judiciaire dans des circonstances où il est allégué qu’il y a eu un exercice irrégulier du pouvoir discrétionnaire de la part du ministre en omettant de renoncer à une pénalité ou de l’annuler (Sifto Canada Corp c. MRN, 2014 CAF 140).

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