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L’imminence du préjudice n’est pas requise pour recouvrer la perte purement économique pour les défauts dangereux

14 juin 2013

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L’absence de « risque imminent » n’empêche pas le recouvrement d’une perte économique découlant d’une structure dangereusement défectueuse, a récemment conclu la Cour d’appel de l’Alberta. En règle générale, les tribunaux hésitent à accorder un manque à gagner ou d’autres dommages-intérêts économiques dans une affaire de négligence ou d’autres délits, à moins que ces dommages-intérêts n’aient un lien de causalité avec un préjudice causé à une personne ou à un bien. Ainsi, l’indemnisation de la « perte purement économique », comme on appelle ces dommages-intérêts, est généralement limitée à certaines catégories d’affaires reconnues. L’une de ces catégories est l’approvisionnement négligent de produits ou de structures défectueux qui sont dangereux. Dans l’arrêt Winnipeg Condominium Corporation No 36 v Bird Construction Co, [1995] 1 RCS 85 [Condo de Winnipeg], la Cour suprême du Canada a indiqué que le recouvrement d’une perte purement économique dans des cas de cette nature exige la présence d’un défaut qui présente un « danger réel et substantiel » pour les occupants de l’immeuble. Dans Vargo v. Hughes, 2013 ABCA 96 [Vargo], la Cour d’appel de l’Alberta a examiné si le recouvrement dans de tels cas nécessite que le risque de préjudice soit classé comme « imminent » et a décidé, contrairement à son indication précédente, que l’imminence du préjudice n’est pas nécessaire pour le recouvrement dans les cas de défauts dangereux.

Au procès (2011 ABQB 649), le juge Hawco a accueilli une action en négligence contre un constructeur pour une perte purement économique subie par les acheteurs subséquents d’une maison en raison de la construction négligente du constructeur qui avait entraîné des vices dangereux. En appel, la Cour d’appel a confirmé la conclusion de négligence du juge Hawco à l’encontre du constructeur et son rejet d’une exigence d’imminence énoncée par le constructeur en se fondant sur une déclaration antérieure non contraignante de la Cour d’appel dans l’arrêt Blacklaws v Morrow, 2000 ABCA 175 [Blacklaws]. Dans l’arrêt Blacklaws, les juges majoritaires de la Cour ont déclaré en passant que Winnipeg Condo exigeait [traduction] « un préjudice physique aux demandeurs ou à leurs biens meubles, ou un risque imminent de préjudice physique ». En rejetant une exigence d’imminence, la Cour, dans l’arrêt Vargo, a estimé que les justifications de principe données dans l’arrêt Winnipeg Condo pour permettre aux acheteurs subséquents de recouvrer le coût de la réparation des vices dangereux ne seraient pas servies par l’imposition d’une telle exigence. Les justifications de la politique données dans l’affaire Winnipeg Condo étaient les suivantes : 1) encourager les propriétaires subséquents à prendre des mesures préventives avant que des dommages physiques à des personnes ou à des biens n’en résultent; et 2) encourager la réparation rapide des défauts avant qu’ils ne survenent, lorsque les coûts de réparation ont tendance à être moins élevés. Dans la mesure où Blacklaws a laissé entendre que le risque doit toujours être imminent, la Cour de Vargo n’était pas d’accord et a fait remarquer qu’un résultat semblable avait été atteint par les cours d’appel de l’Ontario et de la Saskatchewan.

Enfin, la Cour d’appel a réitéré qu’un employeur n’est généralement pas responsable du fait d’autrui des actes négligents d’un entrepreneur indépendant (d’après la décision de la Cour suprême du Canada dans 671122 Ontario Ltd c. Sagaz Industries Canada Inc. 2001 CSC 59). La Cour d’appel a statué que le constructeur était un entrepreneur indépendant plutôt qu’un employé du propriétaire de la maison d’origine et, par conséquent, a accueilli l’appel du propriétaire initial contre la décision de négligence du juge de première instance, qui avait été fondée sur une conclusion de responsabilité du fait d’autrui pour les actions du constructeur.

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