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Le gouvernement du Canada propose d’importantes modifications à la Loi sur Investissement Canada

13 décembre 2022

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Écrit par Adam Kalbfleisch, Zirjan Derwa, Laurie Wright and Kolding Larson

Le 7 décembre 2022, le ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie (le ministre), François-Philippe Champagne, annoncé plusieurs modifications proposées au régime de sécurité nationale en vertu de la Loi sur Investissement Canada (LSA) par l’entremise de la introduction de Bill C-34 : Loi modifiant la Loi sur Investissement Canada. Ce nouveau projet de loi représente la mise à jour la plus importante de la LIC depuis l’introduction du régime de sécurité nationale en 2009.

Selon le ministre, les modifications visent à introduire de nouveaux outils pour s’assurer que le Canada peut « continuer à faire face aux menaces changeantes qui peuvent découler des investissements étrangers ». Les modifications comprennent :

  1. Une nouvelle exigence de dépôt préalable à la mise en œuvre pour les investissements dans les entreprises canadiennes engagées dans des secteurs d’activité visés par règlement, qui n’ont pas encore été identifiés.
  2. Nouveau pouvoir ministériel d’étendre l’examen de la sécurité nationale des investissements.
  3. Amendes nouvelles et accrues pour non-conformité à la LIC.
  4. Nouveau pouvoir ministériel d’imposer des conditions provisoires lors d’un examen sécuritaire national.
  5. Nouveau pouvoir ministériel d’accepter des engagements visant à atténuer les risques pour la sécurité nationale.
  6. La capacité du gouvernement de divulguer des renseignements précis concernant les examens relatifs à la sécurité nationale à des États étrangers.
  7. De nouvelles règles pour la protection des renseignements au cours du contrôle judiciaire.

Parmi ceux-ci, le plus important, à notre avis, est la nouvelle exigence de dépôt préalable à la mise en œuvre pour les investissements dans des secteurs d’activité désignés. Cette nouvelle exigence créera un examen suspensif pour de nombreux investissements qui, auparavant, auraient tout au plus nécessité un avis après la clôture. Pour les transactions dont la période provisoire est longue entre la signature et la clôture, comme celles qui nécessitent d’autres consentements et approbations, cette nouvelle exigence de dépôt peut n’avoir qu’un effet minime. Toutefois, lorsqu’aucun autre consentement ou approbation n’est requis et que la période provisoire entre la signature et la clôture est courte (ou même inexistante comme dans une situation de signature et de clôture), cette nouvelle exigence de dépôt préalable à la mise en œuvre peut avoir une incidence importante sur le calendrier des transactions et la planification des transactions. Notamment, la nouvelle exigence de dépôt préalable à la mise en œuvre s’appliquera également à certains investissements minoritaires sans contrôle, qui très souvent ne nécessitent pas d’autres consentements ou approbations, étant donné qu’il n’y a pas de changement de contrôle.

Contexte des modifications proposées :

Ces modifications proposées font suite à plusieurs politiques importantes annoncées par le gouvernement au cours des dernières années, qui ont signalé un degré de surveillance considérablement accru de certains investissements, en particulier ceux impliquant des investisseurs étrangers appartenant à des entreprises d’État (EE) et des investissements dans des entreprises canadiennes engagées dans la fourniture de biens ou de services essentiels. Vous trouverez ci-dessous un résumé de ces principaux développements récents, qui ont préfiguré les modifications proposées.

Les modifications proposées

  1. Une nouvelle exigence de déclaration préalable à la mise en œuvre pour les investissements dans les entreprises canadiennes engagées dans des secteurs d’activité visés par règlement.

    Le projet de loi C-34 propose de modifier les articles 11 et 13 de la LIC afin d’exiger que les investisseurs déposent un avis avant la mise en œuvre lorsque l’investissement concerne une entreprise canadienne exerçant une « activité commerciale visée par règlement ». Notamment, cette nouvelle exigence de dépôt s’appliquera à un large éventail de placements, y compris les acquisitions de contrôle d’entreprises canadiennes et certaines acquisitions ne détenant pas le contrôle lorsque des critères supplémentaires sont satisfaits et quel que soit le pays d’origine de l’investisseur.

    Les « activités commerciales visées par règlement » n’ont pas encore été nommées et seront déterminées par voie de règlement après l’adoption du projet de loi C-34. Le gouvernement utilise des règlements pour identifier ces secteurs prescrits, plutôt que l’ICA elle-même, afin de faciliter la mise à jour périodique de la liste. Le ministre a déjà déclaré que des domaines tels que l’informatique quantique, l’intelligence artificielle, la cybersécurité et les semi-conducteurs sont des candidats possibles. D’autres domaines possibles comprennent ceux décrits au paragraphe 8 des Lignes directrices sur l’examen de la sécurité nationale des investissements et peut-être plus précisément dans la liste des technologies sensibles décrite à l’annexe A des Lignes directrices.

    L’objectif déclaré de cette modification est de donner au gouvernement une visibilité accrue des investissements dans les secteurs sensibles et, par conséquent, de prévenir les atteintes à la sécurité nationale. Ce changement empêchera le transfert de savoir-faire, de PI et de secrets commerciaux pendant la période intérimaire entre la mise en œuvre d’un investissement et un décret subséquent du gouverneur en conseil exigeant un dessaisissement. Le gouvernement craint que certains actifs et connaissances ne soient transférés à des investisseurs non canadiens avant que le gouvernement ne soit en mesure de terminer son examen de l’investissement, causant ainsi un préjudice irrémédiable à la sécurité nationale du Canada.

    Fait important, les modifications proposées interdisent la mise en œuvre de ces investissements prescrits jusqu’à ce que les périodes prescrites pour l’examen de l’investissement par le gouvernement soient expirées. De plus, le défaut de fournir l’avis préalable à la mise en œuvre requis entraînera une pénalité financière importante (voir plus loin). Le gouvernement a déclaré qu’il publierait des lignes directrices administratives pour aider les investisseurs à déterminer s’ils sont tenus de faire ce dépôt.

  2. Nouveau pouvoir ministériel de prolonger l’examen de la sécurité nationale des investissements

    Le projet de loi C-34 propose d’introduire la possibilité pour le ministre, après consultation du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, de rendre une ordonnance pour un examen plus approfondi d’un investissement en vertu de l’article 25.3 de la LSA. À l’heure actuelle, le gouverneur en conseil rend l’ordonnance d’examen en vertu de l’article 25.3 « sur recommandation du ministre ». À ce titre, ces modifications placeraient la possibilité de prolonger un examen directement entre les mains du ministre

    L’objet de cette modification est de simplifier le processus administratif (en éliminant la nécessité de demander une ordonnance du gouverneur en conseil) pour l’obtention d’une ordonnance en vertu de l’article 25.3, donnant ainsi au gouvernement plus de temps pour terminer son examen de fond de l’investissement.

  3. Amendes nouvelles et accrues pour non-conformité à la LIC

    Le projet de loi C-34 propose d’augmenter les pénalités maximales pour les infractions à la LSIC ou à ses règlements à 25 000 $ et à tout « montant prescrit » pour chaque jour de la contravention. La modification vise à a) rajuster le montant de la pénalité existante (10 000 $) pour tenir compte de l’inflation et b) permettre l’examen et l’augmentation périodiques de la pénalité au moyen de règlements révisant le « montant prescrit ».

    Les modifications proposées créeraient également une nouvelle pénalité de 500 000 $ pour avoir omis de fournir l’avis préalable à la mise en œuvre requis relativement à un investissement dans une entreprise ou une entité canadienne qui exerce une « activité commerciale visée par règlement ». Ce montant ferait également l’objet d’un examen ou d’une augmentation périodiques par voie de règlement.

  4. Nouveau pouvoir ministériel d’imposer des conditions provisoires lors d’un examen sécuritaire national

    Les modifications proposent de créer un nouveau paragraphe 25.3(1.1), qui donnera au ministre, après consultation du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, la capacité d’imposer des conditions provisoires sur les investissements, qui s’appliqueraient jusqu’à ce que l’examen de l’investissement par le gouvernement soit terminé. Les modifications proposées permettraient également au ministre de modifier de telles conditions provisoires lorsque cela est nécessaire pour prévenir un préjudice à la sécurité nationale qui pourrait survenir au cours de l’examen. De plus, le ministre peut également supprimer une condition s’il est déterminé que la condition n’est plus nécessaire pour protéger la sécurité nationale.

    Le gouvernement a déclaré que les seules conditions qui seront prises en considération sont celles qui atténueront le préjudice particulier à la sécurité nationale qui pourrait survenir au cours de la période d’examen. Par exemple, le ministre peut utiliser cette disposition pour empêcher le transfert d’actifs incorporels (PI, secrets commerciaux, savoir-faire, renseignements personnels de nature délicate, etc.) à un non-Canadien avant qu’une décision n’ait été prise à l’égard d’un investissement.

  5. Nouveau pouvoir ministériel d’accepter des engagements visant à atténuer les risques pour la sécurité nationale

    Le projet de loi C-34 propose de donner au ministre, avec l’accord du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, le pouvoir d’accepter des engagements contraignants de la part des investisseurs, afin d’atténuer les risques pour la sécurité nationale. Ces modifications offrent une plus grande souplesse – auparavant, l’imposition d’engagements à l’égard d’une transaction visant à atténuer les risques pour la sécurité nationale ne pouvait se produire qu’au moyen d’une ordonnance de giC.

    Les modifications prévoient également la possibilité de modifier ou, dans les bonnes circonstances, de retirer de tels engagements, si le ministre est convaincu, avec l’accord du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, que les engagements ne sont plus nécessaires. Le gouvernement a déclaré qu’il avait l’intention de surveiller la conformité à de tels engagements et qu’il n’accepterait que les engagements qui répondent aux préoccupations particulières en matière de sécurité nationale soulevées par l’investissement.

  6. La capacité du gouvernement de divulguer des renseignements précis concernant les examens relatifs à la sécurité nationale à des États étrangers

    Les modifications proposées permettront désormais explicitement au ministre de communiquer ou de divulguer des renseignements privilégiés propres à chaque cas au gouvernement d’un État étranger, aux fins d’examens relatifs à la sécurité nationale. Auparavant, le ministre avait une capacité très limitée d’échanger des renseignements propres à chaque cas avec ses homologues étrangers. Le ministre a indiqué que cette modification vise à faciliter la coopération internationale et l’échange d’information pour faire face aux menaces courantes à la sécurité nationale.

  7. De nouvelles règles pour la protection des renseignements au cours du contrôle judiciaire

    Les modifications proposées créeront de nouvelles règles pour le contrôle judiciaire des décisions ou des ordonnances rendues à la suite d’un examen sécuritaire national. Les modifications comprennent la possibilité pour le ministre de demander à un juge d’entendre des observations sur des éléments de preuve ou d’autres renseignements en l’absence du public (et du demandeur et de son avocat) lorsque le juge conclut que la divulgation de la preuve ou d’autres renseignements pourrait porter atteinte aux relations internationales, à la défense nationale ou à la sécurité nationale ou pourrait mettre en danger la sécurité d’une personne. Le juge doit fournir des résumés de la preuve au demandeur pour lui permettre d’être raisonnablement informé de la cause du gouvernement, mais sans divulguer de renseignements sensibles. La décision du juge peut être fondée sur des éléments de preuve même si un résumé de celui-ci n’a pas été fourni au demandeur.

    L’objectif déclaré de cette nouvelle instance à huis clos est de permettre au gouvernement de se fier à des renseignements de nature très délicate pour défendre ses décisions devant les tribunaux sans risquer la divulgation de ces renseignements, y compris au demandeur. Le gouvernement note que ces dispositions sont les mêmes que celles pour les contrôles judiciaires proposées dans le projet de loi C-26 pour les modifications à la Loi sur les télécommunications sur la sécurité du système de télécommunications.

Principaux points à retenir:

Bien qu’il reste encore beaucoup à déterminer en ce qui concerne ces modifications proposées à la LSIC, voici trois points clés à retenir pour les investisseurs étrangers :

  1. Ces modifications proposées représentent les changements les plus importants apportés à la LSIC depuis plus d’une décennie.
  2. Les modifications ont été annoncées par plusieurs annonces de politique par le gouvernement canadien au cours des dernières années, signalant une attention et une attention accrues sur les préoccupations de sécurité nationale liées à certains investissements.
  3. Bien que les amendements soient indépendants des pays, les investisseurs chinois et russes continueront probablement de faire l’objet de la plus grande attention à l’avenir.

Si vous avez des questions au sujet de ces modifications proposées, veuillez communiquer avec le groupe Bennett Jones Competition/Antitrust, qui suivra de près les progrès du projet de loi C-34.

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