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La Cour d’appel confirme qu’une municipalité ne peut pas se fier à des renseignements non divulgués auprès de la Commission de révision de l’évaluation foncière

25 février 2020

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Écrit par Kelsey Meyer, Alexis Teasdale, Andrea Stempien and Stirling Wood

Dans une décision récente, Edmonton (City of) v Ten 201 Jasper Avenue Ltd, 2020 ABCA 60, la Cour d’appel de l’Alberta a confirmé qu’une municipalité doit divulguer tous les renseignements pertinents dont elle a tenu compte lors de la préparation d’une évaluation foncière lorsqu’une personne évaluée en fait la demande. Lorsque les renseignements ne sont pas fournis à la personne évaluée de manière complète et en temps opportun, la municipalité ne peut pas se fier aux documents en retard ou non divulgués lors d’un appel de l’évaluation foncière.  

Les faits

Trois propriétaires de propriétés commerciales du centre-ville d’Edmonton ont contesté leurs évaluations annuelles de l’impôt foncier (les « évaluations ») au moyen d’une demande à la Commission de révision de l’évaluation foncière (la « CRÉF »). En vertu du paragraphe 299(1) de la Municipal Government Act (MGA) pour la divulgation des renseignements que la Ville d’Edmonton (la « Ville ») a utilisés dans son calcul des évaluations, y compris des renseignements de comparaison concernant le calcul des évaluations foncières pour des propriétés similaires appartenant à des tiers (la « demande »). La Ville a fourni certains des renseignements demandés, mais pas tous. 

Quatorze jours avant l’audience devant la CRÉF, la Ville a fourni une divulgation supplémentaire aux propriétaires conformément au paragraphe 8(2) du Matters Relating to Règlement sur les plaintes relatives à l’évaluation (CRR), qui exige que la Ville divulgue la preuve documentaire et tout argument écrit qu’elle a l’intention de présenter à l’audience. La divulgation de la Ville contenait les renseignements demandés par les propriétaires, mais qui n’avaient pas déjà été divulgués par la Ville, relativement à la demande (la « divulgation tardive »).  

Les propriétaires ont soutenu que la Ville ne devrait pas être autorisée à se fier à la divulgation tardive étant donné que la Ville n’a pas fourni la divulgation tardive dans sa réponse à la demande. La CRÉF a accepté l’argument des propriétaires citant le paragraphe 9(4) du CRR, qui stipule qu’une commission d’examen composite ne doit entendre aucun élément de preuve d’une municipalité concernant les renseignements qui ont été demandés par un plaignant en vertu de l’article 299 de la LGG, mais qui ne lui ont pas été fournis. 

La Ville a demandé et obtenu la permission d’interjeter appel, en vertu de l’article 470 de la LGA telle qu’elle existait alors.  Le 22 mars 2018, la Cour du Banc de la Reine a entendu l’appel de la Ville, dans lequel la Ville a soutenu que la portée du paragraphe 299(1) n’est pas assez large pour inclure des renseignements sur des tiers, des renseignements sur d’autres propriétés, ou les renseignements utilisés pour évaluer d’autres propriétés. La Ville a soutenu qu’en fournissant par la suite ces renseignements aux propriétaires, ils avaient dûment divulgué tous les documents pertinents. La Cour du Banc de la Reine était d’accord avec la Ville, concluant que l’interprétation du paragraphe 299(1) par la CRÉF était déraisonnable et râtant l’affaire à la CRÉF, qui serait autorisée à s’appuyer sur la divulgation tardive pour appuyer les cotisations. Les propriétaires ont interjeté appel de la décision devant la Cour d’appel de l’Alberta, où la Cour a été invitée à répondre à deux questions :

  1. Quelle norme de contrôle aurait dû être appliquée à l’interprétation du paragraphe 299(1) par la Commission?
  2. L’interprétation du paragraphe 299(1) par la Commission était-elle correcte? 

La décision

  1. La norme de contrôle à appliquer est celle de la décision correcte lorsqu’on demande à un tribunal d’examiner le bien-fondé d’une décision administrative par voie d’appel prévu par la loi et qu’il s’agit d’une question d’interprétation des lois. Étant donné que l’article 470 de la LGG (tel qu’il existait à l’époque) contenait un mécanisme d’appel prévu par la loi, la Cour devrait en déduire que cela signifie que les normes d’appel devraient s’appliquer lorsqu’un tribunal examine la décision de la CRÉF. Pour de plus amples renseignements sur les normes de contrôle et l’incidence de la récente décision de la Cour suprême du Canada : Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65, voir le blogue de Bennett Jones,  Supreme Court of Canada Reforms Judicial Review.
  2. L’interprétation du paragraphe 299(1) par la CRÉF était correcte. Si une personne évaluée présente une demande de divulgation supplémentaire en vertu du paragraphe 299(1), la municipalité est tenue de divulguer tous les renseignements pertinents, y compris les renseignements de tiers, qui sont pertinents à l’évaluation foncière. La Cour a estimé que « le contribuable ne peut pas prendre de bonnes décisions quant à l’opportunité d’interjeter appel d’une cotisation d’impôt si on ne lui donne pas tous les renseignements pertinents utilisés pour préparer la cotisation ».   Si une municipalité ne fournit pas de divulgation complète et en temps opportun, elle ne sera pas autorisée à se fier aux documents divulgués tardivement pour appuyer la valeur de la propriété évaluée en réponse à une plainte de la personne évaluée devant une commission de révision de l’évaluation foncière.

L’Assemblée législative de l’Alberta a depuis modifié l’article 470 de la LGGM, en supprimant le mécanisme d’appel prévu par la loi et en le remplaçant par un recours en contrôle judiciaire. Pour cette raison, une affaire subséquente, mettant en cause l’article 470 tel qu’il existe actuellement, nécessitera un examen plus approfondi de l’arrêt Vavilov afin de déterminer la norme de contrôle appropriée à appliquer par la commission d’examen pertinente.

 

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