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L’ASFC propose la règle de la « dernière vente » pour l’évaluation en douane

30 mai 2023

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Écrit par Jessica Horwitz, Darrel Pearson, Sabrina A. Bandali, George Reid and Ethan Gordon

L’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) propose de modifier fondamentalement les règles canadiennes en matière d’évaluation en douane dans les projets de modification du Règlement sur l’évaluation en douane (DORS/86-792) (Règlement sur les EFD)) publié le 27 mai 2023. L’objet déclaré des modifications proposées vise l’évaluation des marchandises par les importateurs non résidents (INR) en évaluant les marchandises en fonction de la « dernière vente » dans une série d’opérations ayant entraîné l’importation de marchandises au Canada, mais telles qu’elles sont rédigées, les modifications toucheront également les importateurs résidant au Canada.

Les modifications proposées, si elles sont adoptées dans leur forme actuelle, entraîneront une augmentation des valeurs en douane déclarées et, par conséquent, des montants des droits de douane et de la TPS payables lorsque des marchandises sont importées au Canada. Si l’importateur – résident ou non-résident – a accepté, avant l’importation, de vendre les marchandises à un client au Canada, l’importateur doit utiliser son prix de vente plutôt que son prix d’achat comme base de la valeur en douane. Les modifications auront également une incidence sur les coûts des grossistes, des détaillants et des vendeurs de commerce électronique.

Une période de consultation pour permettre au public et aux intervenants de commenter les modifications proposées se termine le 26 juillet 2023. L’avis de consultation et les projets de modifications sont disponibles ici.

Au Canada, la plupart des marchandises importées sont évaluées à des fins douanières selon la méthode de la valeur transactionnelle, qui est fondée sur le prix payé ou à payer dans la « vente pour exportation » des marchandises à un « acheteur au Canada ». L’expression « vente pour exportation » n’est pas définie dans la Loi sur les douanes ou le Règlement sur les FED, mais la Cour suprême du Canada, dans l’arrêt Mattel (2001 CSC 36), l’a interprété comme désignant la vente par laquelle le titre de propriété des marchandises est transféré à l’importateur. L’expression « à un acheteur au Canada » est une prescription propre au Canada qui n’est pas présente dans le libellé de la valeur transactionnelle figurant à l’article 1 de l'WTO Customs Valuation Agreement ou dans le libellé de la mise en œuvre du traité de tout autre Membre de l’OMC. L’expression « acheteur au Canada » est actuellement définie dans le Règlement sur les EFV comme suit : a) un résident, une entité dont la gestion et le contrôle se situent au Canada; b) un non-résident ayant un établissement stable, qui est un établissement fixe par l’intermédiaire duquel il exploite une entreprise; c) une personne qui n’est ni a) ni b) et qui importe les produits pour sa propre consommation au Canada, ou pour les vendre si elle n’a pas conclu une « convention de vente » des produits à un résident canadien avant l’achat des produits (c.-à-d. : importation de stocks sur la spéculation de ventes futures).

Le Règlement modifiant le Règlement sur l’évaluation en douane, publié aux fins de commentaires le 27 mai 2023, changera fondamentalement ces concepts. Les modifications proposées annulent la règle de Mattel qui identifie la « vente pour exportation » pertinente en fonction du moment du transfert de propriété, et abrogent entièrement la définition actuelle d'« acheteur au Canada ». L’effet sera que ni le transfert de titre ni la résidence/l’établissement stable de l’acheteur ne seront des facteurs pour établir la valeur correcte en douane. Les modifications feraient plutôt en sorte que l’évaluation soit fondée sur le prix de « dernière vente » dans ce qui est en fait l’opération (définie comme l’un ou l’autre des accords, ententes ou arrangements , c’est-à-dire pas nécessairement une vente ou une convention de vente) qui cause l’importation au Canada. Ces changements auront une incidence financière importante sur une grande variété d’entreprises, en particulier les multinationales qui importent au Canada par l’entremise d’une filiale canadienne ou qui vendent des marchandises importées par l’entremise d’une succursale canadienne ou d’un agent dépendant.

Les principales dispositions proposées sont les suivantes :

2.01 (1) Pour l’application du paragraphe 45(1) de la Loi, vendu pour exportation au Canada signifie, relativement à des marchandises, être assujetti à un accord, à une entente ou à tout autre type d’arrangement , quelle qu’en soit la forme, à transférer, en échange d’un paiement, en vue d’être exporté au Canada, peu importe si le transfert de propriété des marchandises est effectué avant ou après l’importation des marchandises.

(2) Si les marchandises sont assujetties à au moins deux accords, ententes ou autres types d’arrangements visés au paragraphe (1), l’accord, l’entente ou l’arrangement applicable pour l’application de ce paragraphe est celui qui concerne le dernier transfert des marchandises dans la chaîne d’approvisionnement parmi les transferts en vertu de ces accords, ententes ou arrangements, quel que soit l’ordre dans lequel les accords, ententes ou arrangements ont été conclus.

2.1 Pour l’application du paragraphe 45(1) de la Loi, l’acheteur au Canada s’entend, relativement à des produits qui font l’objet d’un accord, d’une entente ou de tout autre type d’arrangement visé à l’article 2.01, la personne qui, en vertu de cet accord, entente ou arrangement, achète ou achètera les produits, peu importe si la personne est l’importateur des marchandises ou si elle effectue des paiements à l’égard des marchandises.

L’objectif stratégique déclaré des modifications est d’établir des « règles du jeu équitables » en éliminant ce que l’ASFC qualifie d’avantage injuste pour les INR intermédiaires. Selon l’ASFC, certains INR sont en mesure de déclarer une valeur en douane inférieure à celle des importateurs canadiens en évaluant les marchandises importées en fonction de leur coût d’acquisition, même si leurs clients résidant au Canada ou leurs utilisateurs finaux paient un prix plus élevé pour les mêmes marchandises. Toutefois, telles qu’elles sont rédigées, les modifications proposées ne sont pas propres aux INR et auront une incidence sur tous les importateurs qui revendent des marchandises à des clients au Canada – y compris les entreprises résidentes – lorsque la revente subséquente est convenue avant l’importation. L’ASFC soutient que les modifications proposées sont conformes à l’Accord de l’OMC sur l’évaluation en douane et à la pratique des partenaires commerciaux comme l’UE et d’autres membres de l’OMC, mais pas les États-Unis qui maintiennent une règle d’évaluation de la « première vente » dans certaines circonstances.

Le calendrier de mise en œuvre de ces modifications n’a pas été déterminé par le gouvernement, mais l’entrée en vigueur doit être coordonnée avec l’entrée en vigueur prochaine d’autres modifications à la Loi sur les douanes dans la Loi no 1 d’exécution du budget de 2021 (L.C. 2021, ch. 23), qui précisent, entre autres changements, que l’expression « vendu pour exportation au Canada » sera définie par règlement.

Toutes les entreprises qui importent des marchandises au Canada, et en particulier celles qui importent des marchandises pour les revendre à d’autres clients au Canada, devraient examiner les modifications proposées avec un conseiller en douane canadien expérimenté afin d’évaluer l’incidence potentielle sur leurs valeurs passibles de droits. Les intervenants intéressés sont encouragés à fournir des observations en réponse à la consultation de l’ASFC avant le 26 juillet 2023.

Le bennett Jones' Le groupe Commerce international et investissement possède une expertise de pointe en matière d’évaluation en douane au Canada. Veuillez contacter Darrel Pearson, Sabrina A. BandaliGeorge Reid ou Jessica Horwitz pour discuter de la façon dont ces mesures proposées pourraient avoir un impact sur votre entreprise.

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