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Une approche clarifiée pour les réclamations pour perte économique pure

01 février 2021

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Regard vers l’avenir : Recours collectifs en 2021

Écrit par Doug Fenton, Ranjan Agarwal, Gannon Beaulne and Keely Cameron

En novembre 2020, la Cour suprême du Canada a rendu sa décision dans l’affaire 1688782 Ontario Inc. c. Les Aliments Maple Leaf Inc. Il s’agit d’une décision importante qui clarifie l’approche analytique de l’analyse de l’obligation de diligence dans les réclamations pour négligence pour « perte purement économique », qui englobe les réclamations pour perte de profits, perte de ventes, atteinte à la réputation et autres préjudices économiques non accompagnés d’un préjudice à la personne ou à la propriété. La décision de la Cour confirme que le concept de « lien étroit » juridique est l’outil d’analyse de base pour décider s’il existe une obligation de diligence dans la négligence qui s’étend à la perte purement économique et, le cas échéant, la portée de l’obligation.

Maple Leaf était un recours collectif intenté par des franchisés de M. Sub après qu’une éclosion potentielle de listeria dans une usine de fabrication de Maple Leaf ait mené à un rappel volontaire de certains produits de viande, y compris des produits de viande utilisés dans les restaurants M. Sub.

En vertu des ententes contractuelles en vigueur, les franchisés de M. Sub n’achetaient pas de produits de viande directement de Maple Leaf. Au contraire, l’organisation nationale M. Sub (en tant que franchiseur des restaurants Mr. Sub) et Maple Leaf avaient une entente d’approvisionnement exclusive, en vertu de laquelle Maple Leaf était le fournisseur exclusif de nombreux éléments de menu de base de M. Sub. Les contrats de franchise distincts entre l’organisation nationale M. Sub et les franchisés de M. Sub exigeaient que les franchisés achètent exclusivement des produits de viande Maple Leaf auprès des distributeurs, y compris les produits visés par le rappel.

Il n’y avait aucune preuve que des clients de M. Sub étaient tombés malades après avoir mangé de la viande contaminée, ou que de la viande fournie aux franchisés de M. Sub était contaminée. Toutefois, un communiqué de presse publié par l’Agence canadienne d’inspection des aliments dans le cadre du rappel volontaire a identifié M. Sub comme l’un des nombreux restaurants où les clients pourraient avoir mangé de la viande contaminée. La publicité négative entourant le rappel volontaire aurait eu une incidence sur les ventes des restaurants Mr. Sub. Sur cette base, M. Sub franchisés a intenté un recours collectif contre Maple Leaf, cherchant à recouvrer les pertes économiques découlant du rappel.

Dans une décision à 5 contre 4, la Cour suprême du Canada a rejeté la demande des franchisés, statuant que Maple Leaf n’avait aucune obligation de diligence envers les franchisés de M. Sub pour les protéger contre les pertes purement économiques que le rappel volontaire de produits de viande aurait causés. Bien que Maple Leaf ait une obligation de diligence envers les clients des franchisés de M. Sub pour fournir un produit propre à la consommation humaine, cette obligation visait à protéger la santé et la sécurité des clients et ne s’étendait pas à la protection des intérêts économiques des franchisés.

Pour en arriver à cette conclusion, la Cour suprême du Canada a affirmé que le concept de « proximité » juridique est l’outil analytique déterminant pour déterminer l’existence et la portée d’une obligation de diligence en cas de négligence s’étendant à la perte purement économique. Pour établir l’obligation de diligence, le demandeur doit démontrer non seulement que la perte économique était raisonnablement prévisible, mais aussi que les parties se trouvaient dans une relation suffisamment étroite l’une avec l’autre pour la perte économique.

L’accent mis par la Cour suprême sur le lien étroit s’appuie sur sa décision antérieure dans l’affaire Livent c. Deloitte & Touche, lorsque la Cour a statué que l’existence et la portée de toute obligation de diligence en matière de négligence sont définies par la nature de l’engagement du défendeur et la portée de la confiance raisonnable du demandeur. Pour qu’un type particulier de perte soit recouvrable, cette perte doit suivre les raisons normatives pour imposer un droit en premier lieu. Les arrangements contractuels en place entre les parties seront d’une importance capitale pour déterminer l’existence et la portée de toute obligation de diligence correspondante en cas de négligence.

Dans l’affaire Maple Leaf, la majorité s’est concentrée sur le lien contractuel entre Maple Leaf et l’organisation nationale M. Sub, et entre M. Sub et ses franchisés. Les juges majoritaires ont conclu que la capacité des parties commerciales de structurer leurs affaires par contrat aide à déterminer les « attentes [et] les autres intérêts » qui peuvent être fondés sur la proximité. Si les parties avaient pu contracter des protections contre une forme particulière de perte purement économique, mais qu’elles ne l’ont pas fait, cela va à l’encontre de l’imposition d’une obligation de diligence. De même, si les parties ordonnent leurs affaires par contrat, la façon dont elles ont convenu de répartir les risques éclaire l’analyse de l’obligation de diligence. Les tribunaux devraient être lents à imposer des obligations qui réorganiseraient fondamentalement la répartition contractuelle des risques.

Les juges majoritaires ont conclu que les contrats en place entre Maple Leaf, M. Sub et les franchisés ne révélaient pas une relation suffisamment étroite pour justifier l’imposition d’une obligation de diligence à Maple Leaf pour protéger les franchisés contre les pertes économiques alléguées. L’obligation alléguée contournerait les arrangements contractuels prudents des parties qui ne comprenaient pas une telle obligation. Les franchisés étaient « vulnérables » aux pertes sur les produits de viande rappelés par Maple Leaf, mais cette vulnérabilité résultait des ententes contractuelles des parties. Il n’était pas à la Cour de réorganiser la répartition des risques.

La décision de la Cour suprême dans l’affaire Maple Leaf aura probablement de vastes répercussions sur les fabricants, les franchisés, les détaillants et les autres acteurs commerciaux canadiens. Ce qui est peut-être le plus important, c’est que Maple Leaf affirme que les dispositions négociées d’un contrat entre les parties jouent un rôle central dans l’analyse du lien étroit et, en fin de compte, dans la détermination de l’existence d’une obligation de diligence dans des circonstances comportant une perte purement économique. Le tribunal ne peut pas imposer une obligation de diligence lorsque les parties auraient pu négocier des protections contractuelles, mais ne l’ont pas fait.

La décision aura également un effet critique sur les recours collectifs au Canada. En décrivant clairement l’analyse du lien étroit à entreprendre pour déterminer une obligation de diligence dans les réclamations pour perte purement économique, la Cour suprême a fourni un nouvel outil pour analyser ces types de réclamations, y compris à un stade précoce. Les juges auront désormais une capacité accrue de statuer sur de telles réclamations à l’étape de la certification, empêchant ainsi la certification de recours collectifs qui font valoir une perte purement économique contre un tiers sans lien contractuel, lorsque cette protection étendue n’a pas été spécifiquement négociée.

Nos chefs de file des recours collectifs explorent les faits saillants des recours collectifs au cours de la dernière année et font des prédictions sur l’orientation de la pratique et du droit. Téléchargez votre copie du rapport Actions de recours collectifs: Regard vers l’avenir 2021 ici.

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